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EPU de la Suisse 2013: état des lieux et priorisation

18.08.2015

En mars 2013, se terminait le deuxième «Examen périodique universel» de la Suisse. Le Conseil des droits de l’homme avait alors adopté les 99 recommandations que la Suisse avait reconnues sur les 140 qui lui avaient été adressées. Depuis, l’on sait que les recommandations de l’EPU occupent plusieurs offices fédéraux. Ce que l’on ne sait pas, c’est si la Confédération a décidé de prendre des mesures ciblées afin de mettre en œuvre ces recommandations. 

La Confédération à la traîne

Dans un premier temps, les offices fédéraux se sont départagé les 99 recommandations acceptées, ce qui leur prit plus d’une année. Durant l’hiver 2014/2015, ils ont ensuite déterminé un ordre de priorité pour les différentes recommandations. Le groupe de travail pour l’EPU de la Plateforme droits humains des ONG avait eu au préalable l’opportunité de faire part de sa propre priorisation aux représentant-e-s des officies fédéraux concernés. 

Les offices fédéraux n’ont malheureusement à ce jour (août 2015) toujours pas communiqué une quelconque information sur leur priorisation finale ou sur d’éventuelles mesures entreprises pour mettre en œuvre les recommandations. L’on ne peut que douter, dans ce contexte, que des mesures spécifiques aient été prises pour la mise en œuvre, à l’exception bien sûr des quelques mesures adoptées dans des contextes sans lien avec l’EPU et qui se trouvent un peu par hasard par la suite comptabilisées dans le contexte de l’EPU en tant que «succès». 

En 2016, la Confédération devra préparer son rapport en vue du troisième cycle de l’EPU de la Suisse. Dans ce rapport, les autorités devront rendre compte de ce qu’elles ont fait des recommandations de 2013.

Priorisation du groupe de travail de la Plateforme

En novembre 2014, le groupe de travail sur l’EPU de la Plateforme droits humains des ONG a établi des priorités sur les recommandations acceptées par la Suisse dans le cadre de l’EPU. Les priorités sont présentées selon la classification établie par l’administration. Dans chaque sous-chapitre, le groupe de travail a donné priorité à une ou deux recommandations. Parfois, deux ou trois autres recommandations ont été mises en avant avec le titre de «Recommandations soutenues».

Florilège de recommandations prioritaires

Voici quelques-unes des recommandations jugées prioritaires par le groupe de travail des ONG pour l’EPU. 

Mettre en œuvre toutes les recommandations  acceptées au cours du cycle 2008 de l’EPU (recommandation n°122.48)

Cette recommandation demande à la Suisse d’intensifier ses efforts pour mettre en œuvre toutes les recommandations qu’elle s’est engagée à respecter au cours du cycle 2008 de l’EPU. Ce point est essentiel pour la crédibilité de la Suisse dans le cadre de l’EPU. Cette recommandation a été en faible partie réalisée grâce à la mise en place d’une évaluation externe établissant le degré de mise en œuvre des recommandations de 2008.

Création d’une institution nationale des droits humains en accord avec les Principes de Paris (recommandation n°123.22 et autres)

Au mois de juillet 2015, le Conseil fédéral a, sans raison valable, repoussé de six mois sa décision concernant cette recommandation provenant de nombreux États. Ce louvoiement, qui prévaut depuis 2008, n’a que trop duré. 

Enquêter sur les cas d’usage excessif de la force au cours de l’arrestation, de la détention et de l’interrogatoire de suspects (recommandation 122.39)

La possibilité existant d’introduire un recours contre des membres des forces de l’ordre n’est de loin pas suffisante pour satisfaire à cette recommandation.  Ainsi, une étude du Centre suisse de compétence pour les droits humains (CSDH) sur la protection juridique contre les abus de la part de la police a constaté des lacunes considérables en matière de procédure pénale dans les différents cantons. Le manque d’impartialité et d’indépendance de l’organe chargé de l’enquête constitue une autre faiblesse majeure du système.  Cette dernière faiblesse ne saurait être corrigée sans mesures coordonnées. 

Former les policiers/policières, les procureur-e-s, les juges et les avocat-e-s aux droits humains (recommandations n°122.38 et 123.48)

L’affirmation selon laquelle ce type de formation aux droits humains existe déjà doit encore être vérifiée de façon empirique. Il faudrait pour cela un registre national des formations continues en emploi proposées pour ces différentes professions, spécifiant à chaque fois le public visé, la durée du cours ainsi que son contenu, les intervenant-e-s et le nombre de participant-e-s par année. 

Réduire les inégalités hommes-femmes sur le marché du travail (recommandations n°122.21-122.24)

Le constat de l’inégalité salarial posé par le Conseil fédéral appelle l’adoption de nouvelles mesures efficaces. 

Augmenter l’égalité des chances en matière de formation pour tous les enfants (recommandation n°122.21)

Pour cette question importante, il convient d’établir une vue d’ensemble de l’état de la recherche en éducation, mettant le doigt sur les domaines particulièrement lacunaires et sur les pratiques exemplaires qui peuvent être constatées dans les cantons et les communes. 

Intensifier ses efforts pour lutter contre la discrimination et l’intolérance, en particulier à l’encontre des demandeurs et demandeuses d’asile, des migrant-e-s et des personnes d’origine africaine (recommandation n°122.10)

Quelles sont les stratégies proactives formulées par la Confédération depuis 2013 et depuis mises en œuvre afin d’endiguer le rayonnement des discours populistes appelant à la discrimination et à l’intolérance vis-à-vis de ces populations?