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La Suisse a ratifié la Convention pour l’interdiction des bombes à sous-munitions

23.07.2012

La Suisse a ratifié le 17 juillet 2012 la Convention d'Oslo sur l'interdiction des bombes à sous-munitions. Humanrights.ch se réjouit de cette décision. Le 5 mars 2012, le Conseil national avait approuvé le projet de ratification de la Convention sur les bombes à sous-munitions (BASM) et la révision de la loi sur le matériel de guerre qu’il impliquait. Les 26 voix de l’opposition (contre 146 favorables) étaient avant tout venues des rangs de l’UDC. Le Conseil des Etats, quant à lui, l’avait déjà adopté à l’unanimité le 15 septembre 2011.

La Convention dite «d’Oslo» interdit l’utilisation, le développement et la production des bombes à sous-munitions. Visant une interdiction complète des BASM, l’accord a pour l’instant été signé par 111 Etats et ratifié par 66 d’entre eux (y compris l’ensemble des voisins de la Suisse à l’exception du Liechtenstein). Il n’a en revanche pas été ratifié par des Etats tels que la Chine, la Russie et les Etats-Unis.

La ratification de la Convention entraine une révision de la loi sur le matériel de guerre. Celle-ci doit être complétée par une interdiction des bombes à sous-munitions. Elle implique une interdiction complète de l’utilisation, le développement, la production, l’acquisition, le transfert ainsi que le stockage de BASM. La Suisse doit détruire ses propres stocks d’ici huit ans et interdire toute forme de financement des BASM. Aujourd'hui déjà, la Suisse ne fabrique plus ni ne vend d'armes à sous-munitions.

L’avenir de l’artillerie pas en danger

Le chemin pour en arriver là fut tortueux. Lors de la session d’automne 2011, le Conseil des Etats s’était prononcé à l’unanimité en faveur du projet. A l’inverse, la Commission de politique de sécurité du Conseil national (CPS-N) avait décidé en octobre 2011 de ne pas entrer en matière et soutenu une proposition de rejet du PLR. Contre l’avis de sa commission, le National est entré en matière le 21 décembre 2011 avec une large majorité pour interdire les bombes à sous-munitions. Le dossier était donc retourné à la CPS-N. Sa porte-parole Ursula Haller (PDB/BE) a ensuite déclaré devant le Conseil national que le chef de la planification de l’armée a clairement précisé à la commission en février 2012 qu’une interdiction ne mettrait pas en danger l’artillerie. Cela a visiblement convaincu la plupart des sceptiques de la CPS-N. Ils redoutaient qu’une destruction des BASM puisse être catastrophique pour le futur de l’artillerie.

Pas de durcissement de l’interdiction des financements interdit

Lors de la session parlementaire du printemps 2012, les discussions ont abordé la question de définir quelles formes de financement devaient être interdites. Sur ce point, le National a suivi le Conseil des Etats et rejeté avec 117 voix contre 60 une motion qui voulait durcir l’interdiction du financement indirect.

Ainsi, si le financement direct sera totalement prohibé, le financement indirect ne sera interdit que si le but visé est de contourner l’interdiction du financement direct. La notion de financement direct recouvre les donations, prêts et crédits alors que, par financement indirect, on entend toute participation à des sociétés développant ou fabriquant des BASM ainsi que l'achat d'obligations ou d'autres produits de placement dans ces sociétés.

Les ONG appellent à la ratification

Suite à l’avis de la CPS-N en octobre 2011 de ne pas entrer en matière, une coalition de huit ONG suisses, dont humanrights.ch, demandait au Conseil national de voter en faveur de la ratification de la Convention d’Oslo dans un appel commun du 20 décembre 2011. Pour ACAT Suisse, Alliance Sud, Amnesty International, humanrights.ch, la Section suisse de la Commission internationale des juristes, le Conseil suisse pour la paix, la Société pour les peuples menacés et TRIAL, il en allait de la crédibilité de la tradition humanitaire de la Suisse et de la sécurité de sa population. Autoriser l’utilisation des bombes à sous-munition reviendrait à mettre en danger notre population puisque ces armes meurtrières, qui entraînent chaque année des milliers de victimes civiles, ne pourraient être utilisées qu’à l’intérieur de nos frontières.

Pour une utilisation d’armes à sous-munitions sur le sol helvétique?

Soutenue par les membres de l’UDC et du PLR de la CPS-N, la position de la commission en octobre 2011 avait surpris. «Je dois vous dire honnêtement, cette décision m’a choqué. Après l’approbation à l’unanimité du Conseil des Etats, nous pensions que la ratification de la Convention était en bonne voie. Je constate que les intérêts militaristes de la commission CPS-N sont manifestement encore très fortement représentés», avait déclaré Alex Sutter, rédacteur en chef de humanrights.ch, sur 20 Minuten Online.

La majorité de la CPS-N avait estimé que la convention affaiblirait dangereusement la capacité de défense de la Suisse. Dans son communiqué de presse, elle expliquait que «notre pays – qui n’appartient à aucune alliance militaire en raison de sa neutralité – doit être en mesure de se défendre de manière autonome. Les sous-munitions constituent dans ce contexte un moyen important. La majorité souligne en outre que les stocks de sous-munitions de l’armée ne représentent en rien une menace pour la sécurité de la communauté internationale, sachant que notre armée ne les utiliserait que pour se défendre et que sur le sol helvétique. Enfin, elle rappelle que certains Etats qui jouent un rôle important sur la scène internationale n’ont pas signé la convention.»

Ces Etats sont notamment la Chine, la Russie, les Etats-Unis et Israël. «Si la Suisse se joint à ces bellicistes, elle se met hors-jeu», estimait Alex Sutter sur 20 Minuten Online. L’argument de la capacité de défense du territoire est purement électoral. Il est cynique de dire que les munitions ne seraient utilisées que dans un but défensif et donc seulement sur le sol suisse. «Comme si c’était moins pire si cela touchait sa propre population.»

L’interdiction de financement

Pour Handicap international, «les financements indirects constituent en réalité la plus grande source d’argent frais pour la production de nouvelles armes» et il est impossible de prouver si oui ou non un financement indirect a pour objectif de contourner l’interdiction du financement direct. Dans son communiqué de presse du 12 septembre 2011, l’organisation demandait ainsi à la Suisse d’aller plus loin dans son interdiction de financement indirect. Elle appelait également la confédération à contribuer activement à l’établissement d’une liste internationale indicative des entreprises qui produisent des sous-munitions afin de permettre «aux banques suisses et à leurs filiales à l’étranger, ainsi qu’aux institutions financières, gérants de fortunes et autres investisseurs qui détiennent des comptes en Suisse, de fonctionner avec des règles claires».

Investissements des banques suisses

Dans un article d’août 2011, le journal allemand Handelszeitung montre que le Crédit suisse a pris de l’avance en la matière. Il a ainsi préventivement cessé ses investissements dans le domaine des BASM. Si d’autres banques s’avèrent moins préparées, elles ont cependant pour beaucoup déjà commencé à limiter leurs investissements dans certaines entreprises. L’article montre également que d’autres Etats, tels la Belgique, sont bien plus avancés que la Suisse dans le cadre de la ratification de la Convention d’Oslo. Depuis l’adoption du projet de ratification par le Conseil national le 5 mars 2012, la Suisse est en passe de refaire son retard.

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Articles de presse

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