10.06.2011
Malgré l’interdiction internationale des bombes à sous-munitions (BASM), de nombreuses banques européennes, parmi lesquelles seize institutions financières suisses, continuent d’investir des milliards dans leur production. C’est ce que révèle un rapport d’ONG néerlandaises et belges, qui dénonce notamment les activités du Crédit Suisse et d’UBS. Selon l’avis de plusieurs représentants politiques et l’organisation Handicap International, la Suisse devrait ancrer l’interdiction de financements des BASM dans sa loi. Le Conseil Fédéral a pris ces revendications en compte pour l’élaboration de son projet de loi pour la ratification de la Convention contre les armes à sous-munitions, rendu public le 6 juin 2011. Accepté en septembre 2011 à l'unanimité par le Conseil des Etats suisse, le projet doit encore passer devant le National.
Premier projet de loi décevant
La Convention d’interdiction des armes à sous-munition est entrée en vigueur le 1er août 2010, avec la ratification de 57 pays. La Convention interdit notamment l’assistance à la production de BASM. La Suisse a signé le traité mais ne l’a pas encore ratifié. Un projet de loi de ratification était en consultation en hiver 2010-2011. A ce moment-là, l’ «assistance à la production» n’avait pas été traduite par une interdiction de financement des BASM dans la loi suisse, tandis que la plupart des pays ayant ratifié la Convention avaient pris des mesures dans ce sens. Handicap International, humanrights.ch et plusieurs autres ONG s’étaient prononcés pour une interdiction du financement dans la loi suisse.
Selon Paul Vermeulen, porte-parole de l’association Handicap International, le projet de loi en consultation n’était que partiellement conforme au texte international et aux deux motions adoptées à ce sujet, puisqu’il ne mentionnait pas l’interdiction d’assister la production de ces armes, ni même l’interdiction de les utiliser.
En Suisse, deux motions des conseillers nationaux genevois Liliane Maury-Pasquier et Hugues Hiltpold, acceptées par les chambres fédérales en 2010, exigent une ratification de la Convention ainsi que l’interdiction de tout investissement dans la production de ces armes. Selon la Conseillère nationale Liliane Maury-Pasquier, «l’argent est le nerf de la guerre » et « la Suisse doit se montrer cohérente avec sa tradition humanitaire. La place financière suisse à tout à gagner à améliorer sa réputation, sa crédibilité et sa propreté».
Mesures des banques
Selon les banques mises en cause, le processus de désengagement est en cours. Crédit Suisse dit notamment avoir pris des mesures contraignantes en 2010 pour supprimer tout investissement dans des projets liés à des entreprises produisant des armes à sous-munitions ainsi que toute acquisition de parts de ces compagnies. Le rapport n’aurait, selon le porte-parole du Crédit Suisse, pas pu distinguer les investissements actuels de ceux antérieurs à 2010 mais tout aurait été mis en œuvre pour permettre une adéquation avec la Convention.
Paul Vermeulen affirme quant à lui que «Crédit Suisse a fait part de sa volonté d’agir mais ne peut toujours pas garantir sa politique de désinvestissement dans toutes ses branches. Quant à UBS, sa politique est toujours insuffisante : les éclaircissements nécessaires font toujours défaut.»
Sources
- Interdiction des bombes à sous-munitions : Seize institutions financières suisses continuent d’investir dans la production de ces armes
Communiqué de presse de Handicap International, 25 mai 2011 (n'est plus disponible en ligne) - Bombes à sous-munitions : institutions financières suisses épinglées
Romandie News, 25 mai 2011 - Les liens embarrassants des banques suisses
Tribune de Genève, 26 mai 2011 - Bombes à sous-munitions : les banques nient tout lien
Swissinfo, 1er juin 2011 - Des investissements dans les bombes à sous-munitions continuent, malgré l’interdiction internationale
Communiqué de presse de Netwerk Vlaanderen, mai 2011 - Worldwide investments in cluster munitions: a shared responsibility
Rapport de IKV Pax Christi et Netwerk Vlaanderen, mai 2011