27.01.2016
En Suisse, il y a près de 250'000 parents et enfants qui vivent dans la pauvreté. Cela se manifeste concrètement par une absence de repas équilibrés, de vêtements adaptés à la saison pour chaque enfant et un habitat précaire. Il est par ailleurs préoccupant que les enfants qui sont issus de milieux défavorisés aient eux-mêmes de fortes chances de vivre dans la pauvreté à l’âge adulte. Un constat peu compatible avec l’article 6 de la Convention des droits de l’enfant, qui prévoit que les États parties assurent dans toute la mesure du possible le développement de l'enfant. En tant qu’état partie à la CDE, la Suisse serait dans l’obligation de lutter par tous les moyens à disposition contre la pauvreté des enfants.
Grâce à deux objets déposés auprès du Conseil National, le Parlement devrait bientôt avoir l’occasion de s'attaquer à ce problème.
Pression politique
En octobre 2015, Caritas a publié ses observations annuelles sur la politique de lutte contre la pauvreté. Cette année, elles sont consacrées à la pauvreté des familles. Il en ressort que seule une minorité de cantons mènent une politique familiale systématique visant à prévenir ou à combattre la pauvreté. La Confédération, de son côté, renvoie cet objet aux cantons, au motif que, ceux-ci étant responsables de l’aide sociale, la lutte contre la pauvreté est de leur ressort.
Caritas a un point de vue fondamentalement différent, et elle n’est pas seule. La conseillère nationale Yvonne Feri demande désormais elle aussi que la Confédération prenne des mesures afin d’améliorer la situation des enfants souffrant de pauvreté en Suisse. Dans une motion déposée en septembre 2015, elle demande à ce que le Conseil fédéral (CF) soit chargé d'élaborer une loi complétant au plan suisse les actuelles allocations pour enfant par une allocation sous condition de ressources. Avec cette idée, la parlementaire reprend une idée que le CF avait lui-même déjà formulée en 2015, dans son rapport «Politique familiale État des lieux et possibilités d’action de la Confédération».
Effets à long terme sur les enfants
Dans un second objet, Yvonne Feri demande la réalisation d’une étude sur la situation des enfants dont les familles dépendent de l'aide sociale. Celle-ci devra mettre en lumière les effets que subissent à long terme ces enfants et décrire les moyens d'éviter que la pauvreté ne devienne héréditaire. Le caractère héréditaire de la précarité économique a d’ores et déjà été prouvé par de nombreuses études, aussi bien nationales qu’internationales.
Trop cher pour le CF
Le 25 novembre 2015, le Conseil fédéral a proposé de rejeter les objets déposés par la Conseillère nationale. Dans le cas de la motion pour une introduction d'allocations pour enfant sous condition de ressources, son principal argument est que cette mesure, dont le coût est évalué entre 300 et 600 millions de francs, est….Trop chère.
Sources
- Prévenir la pauvreté des familles (le lien n'est plus disponible)
Communiqué de presse de Caritas, 20 octobre 2015 - Introduction d'allocations pour enfant sous condition de ressources
Motion - 15.3939, déposée par Yvonne Feri (PS/AG) le 24 septembre 2015 - Enfants et aide sociale. Etude sur les effets à long terme
Postulat - 15.3940, déposé par Yvonne Feri (PS/AG) le auf der Website der Parlamentsdienste - Site internet du Programme national contre la pauvreté
- Politique familiale: Etat des lieux et possibilités d’action de la Confédération
Rapport du Conseil fédéral en réponse au postulat Tornare (13.3135) «Politique de la famille» déposé le 20 mars 2013, 20 mai 2015 - Pauvreté en Suisse: le point de vue des droits de l'enfant
Article de Jean Zermatten, du Centre suisse de compétence pour les droits humains (CSDH), 31 octobre 2012